La boîte à livres

Par André Daviaud.

Je l’avoue à ma grande honte, je me couvre de cendres, je me cache, je disparais sous terre. 
Et comme aurait dit Racine : «… je rougis, je pâlis…
Un trouble s’éleva dans mon âme éperdue . »
 Je n'ai jamais emprunté de livres dans une boîte à livres...


Je ne sais pas pourquoi. 
J’ai feuilleté une ou deux fois les volumes empilés dans ces petites maisons sympathiques, souvent attirantes, pleines de bonnes intentions, où des mains anonymes déposent avec amour les livres qu’elles ont appréciés. Je fréquente pourtant des bibliothèques, des médiathèques, des librairies, des boutiques pour livres anciens où s’entassent dans un joyeux capharnaüm les illustrés les plus divers, les revues poussiéreuses et les volumes écornés. J’aime les vieux livres, leur odeur, leur patine. Je me représente tous ces lecteurs qui ont rêvé en ouvrant ces ouvrages.

Même pas peur

Flaubert écrit dans Madame Bovary : « Emma se graissa donc les mains à cette poussière des vieux cabinets de lecture. » Aurais-je peur de me graisser les mains dans les boîtes à livres ? Non ! J’ai chez moi une collection des œuvres complètes de Balzac datant de 1904 avec des illustrations à l’ancienne. Les vieux livres ne me font donc pas peur. En réfléchissant, c’est peut-être le préjugé qui me murmure à l’oreille : « Ces gens qui ont donné ces livres, c’est donc qu’ils acceptaient de s’en séparer, de les offrir à d’autres lecteurs. C’est donc qu’ils ne les aimaient pas tant que cela. » Et, en effet, j’ai horreur de me séparer d’un livre que j’aime, surtout d’un classique. Car, comme l’affirme Italo Calvino : « Un classique est un livre qui n’a jamais fini de dire ce qu’il a à dire. » Je me souviens d’avoir eu à plancher sur ce sujet de dissertation (Vous avez quatre heures !).

Jamais un Zola ou un Hugo

En fait, quand je donne un livre (j’en ai donné beaucoup à la médiathèque de Sainte-Anne d’Auray), j’évalue sa valeur culturelle à mes yeux. C’est totalement subjectif, je le concède. Enfin, pas tant que cela. Je donne facilement des polars, des Musso, des Lévy (Si, si, il m’arrive d’en avoir…), mais jamais un Zola ou un Hugo, voire un Annie Ernaux. Je vous laisse imaginer mes bibliothèques, mes placards et mes rayonnages… C’est sans doute une déformation professionnelle, enfin de ma profession d’autrefois. J’ai du mal à lire un livre qui me semble facile ou mal écrit (selon mes critères encore une fois subjectifs).
Je pense donc que les livres qui sont abandonnés dans les boîtes à livres sont faciles ou mal écrits.  
Ce en quoi j'ai totalement tort ! C

 

Commentaires