Trotteuse

 

Par Marie-Annette Lucas

Coïncidence temporelle ?... À propos d'un autre livre de Michèle Lesbre (cf chronique du mois dernier) dont le titre  La petite trotteuse me faisait de l'oeil, j'imaginais une petite fille trottant, trottinant… mais en y regardant de plus près je découvre qu'il s'agit de la petite trotteuse d'une montre, dont le tic-tac a accompagné la narratrice toute son enfance, et qui est muette depuis le décès de son père. Quoi de plus évocateur qu'une montre  pour indiquer le temps… mais finalement il sera aussi question de la petite fille « trottant » à la recherche du souvenir de son père trop tôt disparu.

Anne visite la dernière de 30 maisons à vendre, sans intention d'acheter, parce qu'elle a retrouvé dans les affaires de son père, outre sa montre, une trentaine de croquis de maisons inachevées, et elle veut y retrouver l'âme des habitants, comme un hommage rendu à son père emporté par la maladie, et dont elle veut percer le mystère.

Dans cette dernière maison en bord de mer, elle va replonger dans ses souvenirs d'enfance, du temps de la guerre, de ses parents qui ne s'entendent guère, de son amour infini pour ce père mystérieux et taiseux, le tout rythmé par  la   montre   et   sa petite trotteuse qui sera le fil rouge de sa quête à la recherche du passé et de l'apaisement.

Il sera aussi question de la pension hors du temps où la narratrice est descendue, d'un chat orange qui lui évoque en parallèle le chat adoré de son père, d'un client qui l'intrigue et va visiter la maison avec elle… Les images du présent et du passé se superposent, se font écho… Un joli roman intimiste à la trame légère faite de rencontres, de souvenirs, de silences, d'où l'on sort plein de douceur et de nostalgie, « qui se faufile dans les méandres du temps » selon les mots de l'auteure elle-même dans une dédicace.

Et je vais vous faire une confidence : la dernière montre que l'on m'a offerte n'avait pas de trotteuse et je l'ai remarqué aussitôt, cela me manquait de voir s'égrener le temps... C

Extrait

" D'un geste machinal, j'avais mis la montre en marche. Le tic-tac avait surgi avec une violence inattendue. J'avais cru ne pas survivre à ce bruit presque imperceptible, cette course inexorable de la petite trotteuse qui me donnait le vertige. " 

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