La vérité du voyage

 

Par Marie-Annette Lucas

Quand j'avais lu Le canapé rouge il y a quelques années, une petite musique douce faite de rêveries, de voyage, de rencontres, de littérature, dans une atmosphère floue et incertaine m'était restée en tête... Alors, pour la couleur, j'ai eu envie d'y revenir et le charme mélancolique a encore opéré.

La narratrice, Anne, entreprend un très long voyage dans le transsibérien jusqu'au lac Baïkal où est parti vivre son ancien amour, Gyl, dont elle n'a plus de nouvelles. Au cours de ce voyage, bercée par les roulements du train et dans la torpeur due à « la lancinante fuite des paysages sans cesse répétée », à travers l'immensité des forêts de bouleaux, de la steppe russe et au gré des villages traversés pendant plusieurs jours, elle observe les autres voyageurs inconnus, comme Igor, imagine leurs vies, et évoque la sienne, le temps d'autrefois avec Gyl, d'autres amours enfuies, d'autre voyages du passé, mais aussi Clémence, cette vieille dame fragile de son immeuble à Paris, toujours installée dans son canapé rouge et à laquelle elle vient régulièrement faire des lectures sur des femmes célèbres.

Un voyage intérieur
L'évocation de Clémence et des confidences sur l'histoire de sa vie, de leur amitié, va prendre au fur et à mesure de la narration une place importante et parallèle au voyage lui-même, tandis que le but du voyage au fin fond de la Russie bien que riche de rencontres originales, va s'avérer vain. Mais il s'agit tout autant d'un voyage intérieur, d'une réflexion sur la vie, sur le temps et les amours qui passent, sur les souvenirs…
Au retour à Paris, Anne a hâte de retrouver Clémence et son canapé rouge... qu'en sera-t-il ? Une finale inattendue fort émouvante...
Un roman à l'écriture délicate, à la fois concrète et évanescente, pleine de sensibilité et de sincérité, accompagné de références à la littérature russe ; une ode au voyage, à l'amitié et à l'amour, grâce à un vieux canapé rouge !

Extrait
« Je savais que le véritable voyage se fait au retour, quand il inonde les jours d'après au point de donner cette sensation prolongée d'égarement d'un temps à un autre, d'un espace à un autre. Les images se superposent, secrète alchimie, profondeur de champ où nos ombres semblent plus vraies que nous-mêmes. Là est la vérité du voyage. » C

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